DES MONDES MEILLEURS
Un texte de Paul Pourveu, mis en scène par Philippe Sireuil.
RESUME
Une journée à la veille d'élections. C’est le septante-cinquième anniversaire de Bob Dylan et la Belgique s’est réveillée mi-figue, mi- raisin. Il y a Jean-Pierre qui vient de se séparer de sa femme et n’arrive pas à décoller de sa table en formica. Il doit écrire un discours politique dont il n’a que le titre « Des mondes meilleurs ».
Il y a Raymond qui se prépare pour sa campagne électorale et qui, attendant avec impatience que sa plume lui écrive son fichu discours, rêve de manger des croquettes aux crevettes à Ostende. Il y a Suzanne, sa femme, qui trouve que leur couple doit se réinventer et qui voudrait une « saison deux » à leur relation.
Il y a Henri, politicien de l’ancienne garde qui, écrasé par cette sensation soudaine d’être complètement à côté de la plaque, disparaît, provoquant la rumeur. Il y a Elise, sa femme qui veut aller à Londres et relit Madame Bovary. Il y a aussi Gwen et Louise qui offrent à qui les croise, de l’absinthe ou des pavés, l’oubli ou la révolte.
Sur fond de questionnement politique et d’insatisfaction conjugale, entre crise et capitalisme, peur de la cellulite et désir de croquettes aux crevettes, s’entrecroisent vies privées et destins politiques, temps présents et révolus.
Une comédie lucide et acide où résonnent en noir-jaune-rouge des lendemains qui (dé)chantent.
(Philippe Sireuil)
DES MONDES MEILLEURS
Paul Pourveur (l’auteur) : Écrire, c’est aussi une manière de vivre. Et de temps en temps, il est un fait que l’on s’utilise comme cobaye pour vivre certaines expériences pour la bonne cause de l’écriture. Je crois qu’il faut être un peu schizophrène. Une double vie s’installe, une vie dans laquelle des expériences sont vécues ou sont provoquées et puis une autre vie dans laquelle on est en déphasage avec soi-même et on analyse ces expériences.
DES MONDES MEILLEURS
Un grand spectacle doté d’une superbe mise en scène de Philippe Sireuil, particulière dans son déploiement , précise , quelque peu originale , très bien étoffée, menée tambour battant dans la direction des acteurs.
RENCONTRE : HINDE KADDOUR –PHILIPPE SIREUIL (extraits)
H.K: Ce qui m’a frappée quand j’ai ouvert le texte de Pourveur, ce sont ses points de rencontre avec Les Mains sales de Sartre, que vous avez mis en scène à la Comédie en 2013. C’est une nécessité pour vous aujourd’hui de faire un théâtre sur la politique ?
P.S : « Ce n’est pas une pièce politique, mais une pièce sur la politique » disait Jean-Paul Sartre à propos de son texte. On pourrait dire de fait la même chose du texte de Paul Pourveur. D’autres thématiques relient les deux ouvrages : le croisement de l’intime et du politique, l’opposition entre le pragmatisme et l’idéal, le cousinage des figures intellectuelles - petite- bourgeoise pour Hugo dans Les mains sales et bobo pour Jean-Pierre dans le texte de Pourveur. Si ce n’est que les mots ne font plus sens, ni auprès de ceux qui les profèrent, ni auprès de ceux qui les écrivent, que la faillite a remplacé l’utopie, que le slogan et l’hydre néo-libérale pilotent la pensée, que le camarade a fait place au hipster et que l’engagement se dissout dans les affres du réel au lieu de chercher à le transformer.
La chose politique, ses postures, sa rhétorique, l’homo politicus et son théâtre m’ont de tout temps passionné, mais je n’avais pas songé que la contiguïté entre les deux textes était aussi prégnante, sans doute, parce qu’en matière de forme et de posture, tout les différencie et les oppose même. Sartre magnifie l’usage des mots, Pourveur s’en méfie, Sartre ne se préoccupe pas des formes, Pourveur s’amuse avec elles.
H.K Le récit tient une place importante dans le texte de Pourveur. Les séquences dialoguées sont parfois interrompues par une narration qui fait avancer l’intrigue, ou par les « Rapports » tout à la fois absurdes et précis du « Bureau du Plan » ... Comment allez-vous traiter cette matière dans la mise en scène ?
P.S: Je suis surtout frappé de la rapidité avec laquelle l’écriture passe d’une forme à l’autre, d’un lieu à l’autre, d’un temps à l’autre – même à l’intérieur d’une séquence, la réplique qu’on croyait destinée à tel rôle s’avère en introduire un autre. Nous sommes face à un puzzle, donc à une matière à la fois très organisée et très découpée. Nous ne pourrons en trouver l’image synthétique qu’après avoir testé toutes les virtualités, c’est dire si le travail des répétitions avec les acteurs et les différents collaborateurs artistiques sera déterminant. Le récit, les rapports, les citations, les situations dramatiques, sont autant d’éléments que je m’évertuerai à partager entre toute la distribution, il nous faudra à la fois baliser et mélanger, prendre garde à ne pas « figer » ce texte qui procède par rebond, par ricochet.
Le bureau du plan n’est pas une invention littéraire, c’est en Belgique « un organisme fédéral d'intérêt public qui réalise des études et des prévisions sur des questions de politique économique, sociale, environnementale », ainsi qu’on peut le lire sur le site de l’institution. Les rapports qui ponctuent le texte de Pourveur relèvent eux de la fiction et de la fantaisie.
H.K : Pourquoi des Mondes meilleurs ? Pourquoi le pluriel ?
P.S : Hormis l’écho à Huxley et à Voltaire, je ne sais pas, sauf qu’il y a dans l’adjectif l’espérance d’un lendemain qui chanterait, qui enchanterait - on sait l’ironie qui peut le contenir ... Pour ce qui est du pluriel, Raymond ne cesse de poser la question à Jean- Pierre, et Jean-Pierre ne répond pas. J’aurais plutôt envie de faire comme Jean-Pierre ...
On pourrait dire plus sérieusement que, par refus de la causalité déterministe, la pluralité des interprétations et des lectures anime sans cesse l’écriture de Paul Pourveur, et que le choix du pluriel dans le titre résonne dès lors comme un manifeste.
DES MONDES MEILLEURS
Dix comédiens parfaits, entrés remarquablement dans leurs personnages, jouant le texte de Pourveur avec énergie, exaltation et intelligence.
Ce n’est pas une pièce facile. Il faut y être très attentif pour suivre l’évolution de l’histoire.
Une comédie lucide et acide sur fond de crise du capitalisme , d’insatisfaction conjugale et de désir éperdu de croquettes de crevettes.
Le spectacle se déroule dans la grande salle des Martyrs.
Un immense plateau vide avec en fond de scène une série de portes qui claquent à chaque instant, permettant le passage des acteurs dans des mouvements agités.
Scénographie remuante !
Véritable chorégraphie !
90 minutes de propos endiablés !
GENERIQUE
Texte : Paul Pourveur
Les Acteurs : Frank Arnaudon, Pauline Desmet , Gwendoline Gauthier , Janine Godinas , Berdine Nuselder , Julie-Kazuko Rahir , Fabrice Rodriguez, François Sikivie , Hélène Theunissen, Chloé Winkel.
Mise en scène : Philippe Sireuil
Vidéo : Stefano Serra
Décor sonore : François Joinville
Maquillages : Urteza Da Fonseca
Costumes : Catherine Somers
Scénographie : Vincent Lemaire
Assistante stagiaire à la mise en scène : Delphine Peraya
Lumières : Philippe Sireuil
Construction du décor : Alain-Max La Roche et Olivier Waterkeyn
Régie plateau : Stanislas Drouart
Régie son et video : Antoine Halsberghe
Régie lumière : Bruno Smit
Directeur technique : Lorenzo Chiandotto
Chargée de production : Charlotte Dumont
Production : La Servante
Coproduction : Comédie de Genève, Rideau de Bruxelles, Théâtre en Liberté et Théâtre de la place des Martyrs
Photos : Alice Piemme
DES MONDES MEILLEURS
Jusqu’au 26/03/16
THEATRE DE LA PLACE DES MARTYRS
Infos-Réservations 02 / 223 32 08
Amis de l’émission,/blog » Les Feux de la Rampe » , heureux de vous retrouver chaque jour.
Notre moment de séparation : Jeudi soir , sur RTBF/LA DEUX, à 20h25, l’émission de Joëlle Scoriels « 69 minutes sans chichis » avec , en invité d’honneur : LAMBERT WILSON , grand comédien français dont on parle beaucoup en ce moment non pas spécialement pour le cinéma et le théâtre, mais pour « La Chansonnette » où Lambert Wilson chante Yves Montand.
Bonne soirée à Vous tous et à tout bientôt.
Roger Simons