( Republication de cette pièce créée au Théâtre des Riches-Claires en mai 2014, publiée sur ce blog.)
JESSICA GAZON et THIBAUT NEVE
Une pièce extrêmement intéressante qui nous fait découvrir – en tout cas pour certains - une maladie grave !
SYNOVIE - LIQUIDE SYNOVIAL
Le liquide synovial ou synovie est un liquide biologique produit par la membrane synoviale.
Ce liquide est visqueux, transparent ou jaune pâle, d’où son nom évoquant du blanc d’œuf...
Que l’on se rassure, on ne parle pas que de ça dans ce spectacle mais on évoque cette maladie qui fait souffrir la jeune femme.
Elle a 15 ans. Du jour au lendemain, elle est frappée par un mal mystérieux. L’isolement la guette.
Sa mère, face à l’incompréhensible errera entre médecines traditionnelles et parallèles jusqu’à l’apparition d’un vieux médecin et de son petit-fils.
Ils décident ensemble de traquer ce mal douteux pour conduire Synovie vers la rémission.
JESSICA GAZON ET THIBAUT NEVE
Premier rendez-vous chez le médecin du village, le docteur Fourire.
Synovie prend le verre, essaie de boire et n’arrive pas à bien avaler.
Diagnostic : « La crampe de l’écrivain »
"Votre fille fait du théâtre, elle doit faire un blocage psychologique. Elle aime tellement la scène qu’elle a peur. C’est comme les écrivains et leur page blanche. Ils en ont des crampes."
Elle, son outil, c’est la parole, c’est peut-être pour ça que de temps en temps, sa bouche se crispe et ne « veut » plus parler. Prenez peut-être rendez-vous chez un neurologue ? Histoire de voir s'il n’y a rien de grave.
SYNOVIE
Thibaut a eu cette idée originale de spectacle.
Jessica en a écrit le texte.
Ils se sont chargés tous les deux de la mise au point et de la mise en scène, elle aussi originale et rarissime.
Jessica Gazon : La maladie. On en fait tous, des petites, des grandes. Elle nous concerne tous de près ou de loin. Alarmistes , démissionnaires , forts comme un roc , dans le déni , dans la complaisance ou dans le rejet , nos réactions face au grand spectre de la santé sont multiples , complexes et questionnent par la même occasion notre rapport à la vie , à la mort , à vivre.
Et c’est à travers Synovie et à travers l’âge de Maurice Sévenant , infatigable comédien de 82 ans , que les enjeux du spectacle vont ici apparaître , entraînés par des compagnons de route de longue date , précieux, sans qui cette aventure ne serait pas possible.
Synovie : Certains disent que toute maladie est une confession par le corps. D’autres pensent que la nature peut faire des erreurs.
Moi je n’en sais rien.
Marguerite Duras disait : « C’est toujours dans les régions où je ne comprends plus rien que je vais »
Cette maladie reste un mystère, impalpable, inapprivoisé.
Et je ne trouverai certainement aucune « réponse ». Tant mieux.
L’important, c’est le chemin et ce qui échappe.
Michel Huellebecq : On patauge toujours dans un brouillard sanglant, mais il y a quelques repères. Le chaos n’est plus qu’à quelques mètres. Faibles succès, en vérité ! »
Plus tard...
Les symptômes sont de plus en plus importants. On finit par prendre rendez-vous chez un neurologue.
"Madame, je ne vois rien d’anormal. Elle est en période d’adolescence, c’est la pire. Votre fille souffre certainement de ce qu’on appelle la « spasmophilie » accompagnée de crise de tétanie. Il fut qu’elle fasse des cures de calcium et qu’elle respire son propre air dans un sachet lors des crises, elle devrait être plus calme avec ça."
SYNOVIE/JESSICA GAZON
Le plateau s’éclaire légèrement et braque un spot sur ce comédien calmement assis, avec sur le pupitre (de partition) le texte de la pièce. Et le voici qu’il prend la place de Synovie et raconte son histoire. Face à lui, Synovie et sa mère suivent l’histoire par une gestuelle significative.
C’est imaginatif, inaccoutumé, original !
Une pièce axée uniquement sur la médecine !
RESUME : Un médecin octogénaire s’affaire dans un dispensaire.Un jeune infirmier l’assiste.Une femme a sauvé sa fille en la couvrant de son corps.Obstinée, cette mère tentera de faire reconnaître le miracle par le scientifique, dusse-t-elle faire vaciller ses dernières certitudes.
C’est attachant, curieux, de suivre cette aventure médicale oscillant entre humour et étrangeté.
Synovie métisse science et croyances, au cœur d’un huis clos hallucinant et irraisonné.
Maintenant j’attends
Le théâtre c’est fini
L’avenir c’est fini
Je serai handicapée jusqu’au bout. Et puis bientôt morte, à petit feu.
Mais je neveux pas mourir.
J’ai peur.
Même si j’attends la mort, j’ai peur.
Je sais qu’elle est là, qu’elle attend aussi...
SYNOVIE /THIBAUT NEVE
Toutes les conclusions y passent :
« fibromyalgie idiopathique »
« dystonie focale »
« neurasthénie galopante »
« luminothérapie pepe »
« névralgie facial ».
« teleptal »
.. Et combien d’autres verdicts...
entre autres sur la voix, le larynx, le pharynx , la bouche , les fosses nasales, le thymus...
Synovie : Dans six mois si tout va bien on pourra m’opérer aller chercher et enlever les résidus de thymus autour du cœur.
Je me fais à l’idée de vivre avec une tirette entre les seins pour le restant de mes jours. Ce sera ma faiblesse et ma force.
INTERPRETATION
Le jeu des acteurs - ils sont quatre – est tout différent d’un travail habituel de mise en action et de mise en scène.
Il faut suivre la pièce – d’une durée de soixante minutes - avec une attention soutenue.
On se trouve dans une ambiance pondéreuse où l’on suit l’évolution de la maladie. On se pose aussi des questions sur ce mal mystérieux.
Une idée de pièce dramatique étrange et étonnante.
Les quatre comédiens sont impeccables :
Maurice Sévenant (le médecin octogénaire)
Jessica Gazon (Synovie)
Laurence Warin (la mère)
Stéphane Pirard (l’infirmier)
L’équipe :
Vincent Bresmal (scénographie)
Jean-Marc Amé (assistant)
Julie Petit-Etienne – Marion Pillé (création lumières)
Elise Abraham (costumes et accessoires)
Guillaume Istace (créateur sonore)
Quentin Marteau(visuel et photos)
Gaulier Loubris (stagiaire)
Kim Vanvolsom (attachée de diffusion)
« On est toujours deux, un vivant et un mort, et les deux sont constamment en prise » (Bram Van Veld)
SYNOVIE
Jusqu'au 14/11/15
Synovie : Au cours des mois suivants, on commence à diminuer la cortisone Ma laideur s’estompe, lentement , au même rythme que ma honte. Je vais enfin redevenir humaine. Je suis sur la case départ de ma vie.
Je dois apprendre à me réapproprier un corps dévasté. Je dois apprendre à parler, au delà des mots. Je dois apprendre à aimer...
THEATRE DE LA VIE
Rue Traversière 45 - 1210 Bruxelles
Infos Réservations : 02 /219 60 06
Vraiment, ce spectacle est des plus intéressants sur les plans sujet et interprétation.
Amis lecteurs, merci de votre attention et de votre fidélité.
Notre moment de séparation : Ce jeudi 12/11 -22h- sur La Trois (RTBF) , à voir de toute urgence ce film magnifique de Wim Wenders "LE SEL DE LA TERRE"
Un document où l'on découvre l'étonnant photographe Sebastiao Salgado qui a parcouru le monde et photographié les conflits , la famine , l'exode.
Un film passionnant et émouvant !
A tout bientôt !
Roger Simons
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