Mensonge ou déni ?
Lequel est le plus pardonnable ?
Deux questions portées à notre réflexion...
Direction : Théâtre Le Public
Scénario
Maitre Alain Kramer ( Michel Kacenelenbogen) , brillant avocat parisien , marié, père heureux , bobo très , très aisé, mène une vie rangée que rien ne trouble ..Jusqu’à ce petit matin où il se réveille dans le canapé de son salon...nu , complètement nu...
A ses côtés, son conseillé fiscal Nicolas Prioux (Nicolas Buysse), nu, complètement nu lui aussi...
Fa falloir expliquer cela à Mme Kramer ! Mais par où commencer quand on ne se souvient pas soi-même de ce qui est arrivé
Dans un univers rempli de repères rassurants, l’aventure de cet avocat l’est nettement moins : plus rien n’est explicable, plus rien n’est rationnel
Deux hommes, nus comme un ver de terre, allongés l’un à côté de côté de l’autre ! Curieux ! Serait-ce des... ?
Sébastien Thiéry (l’auteur) : J’aime bien que la situation déstabilise le héros, qu’il se pose des questions jamais posées.
Et c’est encore plus fort quand on a affaire à un bourgeois pris dans un schéma de vie classique.
Là, le héros est vraiment hétérosexuel, mais les faits contredisent ce qu’il a dans sa tête.
Alors, il fouille dans sa propre vie, cherche des indices de refoulement ou des preuves de son hétérosexualité.
Il va même jusqu’à s’inventer une fausse maîtresse qu’on essaierait plutôt de cacher ! Mais pour lui, c’est une manière de se fabriquer une preuve... parce que sa femme (Isabelle Paternotte) ne le croit pas. Mais elle ne le juge pas. Elle essaie de comprendre ce qu’il a au fond de lui.
La question de la sexualité dans le couple m’intéresse beaucoup, le décalage entre la sexualité dont on parle et celle dont on ne parle pas, qu’on garde pour soi.
MENSONGE OU DENI ?
Alain Lempoel ( le metteur en scène) : Depuis la nuit des temps, la nudité fait débat dans nos sociétés. L’homosexualité n’est pas en reste non plus et est encore trop souvent considérée comme un tabou.
Or, c’est dans cette double circonstance que madame Kramer découvre son mari et son fiscaliste niant tous deux savoir comment ils en sont arrivés là, nus et côte à côte.
Avec Sébastien Thiéry, les personnages ne sont jamais ceux que l’on croit être, l’auteur ne cesse jamais de révéler à ses créatures, des vérités qui les concernent au plus profond de leur être mais qu’ils ne pourront jamais percevoir.
Sa force ? Un mise en situation hors du commun et une absence totale de rationalité.
Le pouvoir de décalage offre des situations particulièrement absurdes. Avec Sébastien Thiéry , le mot «extraordinaire » reprend tout son sens. Il renverse toutes les certitudes, toutes les valeurs, toutes les évidences superficielles auxquelles nous nous raccrochons faute de mieux et qui nous permettent de vivre sans trop se poser de questions.
Mon travail a consisté à retirer aux comédiens toutes les velléités de rationalité qu’ils ont en eux et auxquelles ils voudront se raccrocher afin de construire leur personnage ; une sorte de mise en abîme pour que le décalage soit total.
Chemin de création légitime mais exercice difficile et angoissant pour des comédiens, à quoi peuvent-ils donc se raccrocher ?
Le traditionnel vaudeville utilise allégrement le mensonge comme ressort comique. Sébastien Thiéry ajoute cette notion abyssale pour le cerveau humain, le déni.
(s’adressant au public) Ne tentez donc pas trop d’explications, ni de radicalité, lorsque vous verrez s’ébattre et surnager des personnages englués dans des situations particulièrement irrationnelles puisque le drame qui se déroulera sous vos yeux aura pour vocation principale de vous faire rire !
Deux façons de découvrir la pièce :
Où sérieusement en tenant compte du propos de l’auteur.
Ce sujet peut concerner beaucoup de personnes. Vous peut-être qui vivez cette situation. A Vous de juger.
Deuxième possibilité : voir cette pièce pour bien vous marrer du début à la fin, considérer « Deux hommes tout nus » comme une espèce de vaudeville ou comme une comédie de boulevard ! Les situations sont délirantes, déjà de se promener quasiment nu sur le plateau du théâtre .A signaler que cette nudité n’est que passagère...quoique...
C’est plein de quiproquos ! C’est jubilatoire !
Les personnages sont bien pochés, bien croqués, surtout ces « deux hommes tout nus »
L’épouse, Mme Kramer, ne saisit pas très bien ce qui se passe dans sa maison, ni ce que fait cet individu « à poil » chez elle.
Elle soupçonne son mari et cet homme d’être des homos.
Et aussi ,la « pute » plutôt sexy, très accrocheuse, elle apparaît un court moment pour exercer « son métier » auprès de l’avocat Kramer. Ne regardez pas Mesdames ...
Question essentielle : Sont-ils homosexuels tous les deux ?
Réponse bien entendu au théâtre.
Des scènes délirantes, complètement folles !
C’est un spectacle de fin d’année ,
C’est tout dire !
Une troupe de joyeux drilles se débattant dans les marécages d’une situation totalement inédite et inextricable par l’un des auteurs de comédie le plus en vue du moment.
Alain Lempoel (au public) : Rassurez-vous ça n’arrive qu’aux autres...quoique ?!
Générique de fin :
Pour jouer cette comédie poilante , quatre comédiens joyeux : Nicolas Buysse (Mr Prioux) Michel Kacenelenbogen (Mr Kramer) , Isabelle Paternotte (Mme Kramer) , Laettia Salsano ( la jeune...femme déshabillée)
Mise en scène : Alain Lempoel
Assistanat à la mise en scène : Laetitia Salsano
Scénographie et costumes : Dimitri Shumelinsky assisté de Alice Delpeyroux
Lumière : Marcel Derwael
Son : Laurent Beumier
Création maquillage : Patricia Timmermans
Création coiffure : Thierry Pommerell
Régie : Pierre Hendrickx
Stagiaire régie : Martin Celis
Photos : Bruno Mullenaerts
DEUX HOMMES TOUT NUS /SEBASTIEN THIERY
Jusqu’au 31/12/15
THEATRE LE PUBLIC
Rue Braemt 64-70 – 1210 Bruxelles
Infos Réservations : 0800 / 944 44
Bon plaisir !
Info: Une nouveauté à noter sur votre calepin :" Ces discours qui ont changé le monde" ( spectacle off) avec Magali Pinglaut et Itsik Elbaz.Tous deux s'emparent de propos denses pour nous donner un avant goût de ce qui deviendra "QUI SAIT" , leur prochain spectacle, du 19/11 au 28/11/15 à 19h
Amis de l’émission/blog « Les Feux de la Rampe », merci pour votre présence régulière sur mon blog.
Notre moment de séparation : Un film de grande qualité réalisé en 2012 par Lucas Belvaux « 38 », adapté du roman de Didier Decoin : « Est-ce ainsi que les femmes meurent ? » avec Yvan Attal et Nicole Garcia. Un film relativement dur sur les petites lâchetés humaines.
Bonne vision et à tout bientôt !
Roger Simons